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L’impact sonore des éoliennes

Mesure de bruit sur un parc – © Ghanta

L’éolien pose la question des nuisances sonores. En France les émissions sonores des éoliennes sont très réglementées et les plaintes des riverains sont rares. L’acoustique des sites éoliens sont est règlementé par l’arrêté ICPE du 26 août 2011 , applicable, depuis le 1er janvier 2012, à l’ensemble des parcs français.

Les textes fixent un seuil de niveau ambiant à 35 décibels (dB) dans les zones à émergences réglementées, ainsi que les valeurs maximums admissibles lorsque ce seuil est dépassé. Ces valeurs sont de 5 dB le jour et de 3 dB la nuit (de 22 h à 7 h du matin). Cela signifie que lorsque le niveau de bruit ambiant dépasse 35 dB, la différence entre le bruit résiduel et le bruit ambiant de doit pas dépasser 5 dB supplémentaires la journée et 3 dB la nuit. Si le niveau de bruit ambiant est inférieur à 35 dB, la mesure ne s’applique pas.

Une procédure contraignante qui protège les riverains

Lors des études de développement d’un futur parc éolien, des mesures sont prises au niveau des ZER, pendant une à plusieurs semaines. Le bruit des futures éoliennes est ensuite modélisé, afin de déterminer le bruit ambiant du site.

Une fois les éoliennes construites, une nouvelle campagne de mesure est organisée en alternant des phases d’arrêts et de fonctionnement des éoliennes. Quand les seuils de 3 à 5 dB sont dépassés au delà des 35 dB, il est nécessaire de calculer un programme de bridage des machines.

En cas de plaintes de riverains, la réglementation ICPE permet au préfet de demander une expertise sur le site. Si celle-ci montre un non-respect de la réglementation, le parc peut être arrêté. Dans la pratique, il n’y a jamais eu d’arrêts de parcs pour cause de bruit. Les développeurs ainsi que les exploitants des sites respectent les seuils fixés par la législation.

Échelle de bruit des éoliennes

Source : Observ’ER d’après Bruitparif

Deux types de réglementation limitent le bruit des éoliennes, chacune variant en fonction du niveau d’urbanisation du site et/ou de la période (jour / nuit). Certains pays fixent des niveaux sonores absolus, comme le Danemark, l’Allemagne, la Belgique ou les Pays-Bas. Au Danemark, le maximum légal dépend de la vitesse du vent et de la concentration de logements. Pour un vent de 8 m/s en zone rurale, il est fixé à 44 dB. En Allemagne, le plafond de bruit varie entre 35 et 45 dB la nuit et entre 50 à 60 dB le jour, selon la concentration d’habitations.

D’autres pays, dont la France, définissent des niveaux sonores relatifs en termes d’émergence et des niveaux sonores absolus en dessous desquels l’émergence n’est plus prise en compte. C’est le cas de l’Angleterre, de l’Australie ou de la Nouvelle-Zélande. En Angleterre, le critère d’émergence est de 5 dB de nuit comme de jour. La réglementation considère qu’un seuil de 43 dB est suffisant la nuit en extérieur des habitations pour protéger le sommeil des habitants.

L’Anses préconise toutefois trois mesures : « renforcer l’information des riverains lors de l’implantation de parcs éoliens », systématiser « les contrôles des émissions sonores des éoliennes avant et après leur mise en service » et « poursuivre les recherches sur les relations entre santé et exposition aux infrasons et basses fréquences sonores ».

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) a été saisie en 2013 par le Ministère de la santé et le Ministère de l’environnement afin de réaliser une expertise relative aux effets sanitaires potentiels des basses fréquences et infrasons dus aux parcs éoliens. En 2014, l’Agence a mis en place un groupe de travail constitué d’experts en acoustique, en météorologie, en épidémiologie et en évaluation des risques sanitaires. L’Anses a fait réaliser des campagnes de mesures de bruit (incluant basses fréquences et infrasons) à proximité de plusieurs parcs éoliens. Les mesures ont été réalisées avec des vitesses et des directions du vent différentes, simultanément en quatre lieux situés à la distance minimale réglementaire de 500 mètres des premières habitations. Elles ont été complétées par des mesures effectuées en façade de maisons implantées au plus près de chaque parc (elles étaient situées à 900 mètres des parcs).

Les résultats de ce travail ont fait l’objet d’un rapport et d’un avis, élaborés et publiés par l’Anses en mars 2017.

Les mesures confirment que si « la part des infrasons et des basses fréquences sonores prédomine dans le spectre d’émission sonore des éoliennes », elles ne montrent  « aucun dépassement des seuils d’audibilité dans les domaines des infrasons et des basses fréquences ». Les connaissances actuelles « ne justifient ni de modifier les valeurs d’exposition au bruit existantes, ni d’introduire des limites spécifiques aux infrasons et basses fréquences sonores ».

L’éolien en mer

En mer, les travaux d’installation des éoliennes (forage, battage de pieux, etc,.) émettent des sons qui peuvent perturber la faune marine. En effet, les mammifères marins s’orientent grâce à des échos sonores. Si leur ouïe est endommagée, momentanément ou définitivement, ils peuvent être exposés à des risques d’échouage. L’Ifremer estime que pour éviter les lésions physiologiques, les animaux ne doivent pas être exposés à des niveaux crête d’exposition sonore (bruit instantané) supérieurs à des valeurs de 149 à 230 dB ni à des niveaux d’exposition sonore pondérés (énergie sonore cumulée dans le temps) de 144 à 215 dB, les seuils variant selon les espèces. Les bruits sous-marins n’étant pas comparables aux bruits aériens, les échelles en dB sont différentes.

La directive-cadre européenne “Stratégie pour le milieu marin” de 2008 (2008/56/CE) impose aux États-membres de « prendre toutes les mesures nécessaires pour réaliser ou maintenir un bon état écologique du milieu marin au plus tard en 2020 ». Cela inclut les pollutions acoustiques, qu’ils ont en charge de prévenir et de réduire.

Filets amortisseurs de son - © Vattenfall/Ulrich Wirrwa
Filets amortisseurs de son – © Vattenfall/Ulrich Wirrwa

En France, où la filière éolienne en mer est encore en phase d’apprentissage, aucun seuil n’a pour l’instant été introduit. Seul l’arrêté du 1er juillet 2011 interdit « la destruction, la mutilation, la capture ou (…) la perturbation intentionnelle (…) des animaux dans le milieu naturel » mais ne fixe pas de seuils d’émissions sonores à respecter.

Les technologies les plus utilisées par les développeurs européens sont des rideaux de bulles tout autour du site d’installation ou le fait de déployer sur toute la zone des travaux un filet équipé de balles de plastique réduisent la propagation du son.

Une autre approche consiste à imposer un contrôle pour qu’aucun mammifère ne pénètre dans la zone de travaux. Si cela arrive, les travaux sont alors interrompus temporairement.

Il faut noter qu’il existe en mer des opérations plus bruyantes que l’installation d’éoliennes, comme les relevés sismiques sous-marins, le passage de navires commerciaux ou les essais sonar de la marine. Ces différentes activités ne sont pas régulées de la même façon, voire pas du tout.

  VOCABULAIRE

Bruit résiduel : niveau de bruit en l’absence du bruit généré par les éoliennes.

Bruit ambiant : niveau de bruit incluant le bruit des éoliennes en fonctionnement.

Emergence : différence arithmétique entre le niveau de bruit ambiant et le niveau de bruit résiduel.

Zones à émergence réglementée (ZER) : intérieur des immeubles habités existant à la date de l’autorisation de l’installation éolienne et de leurs parties extérieures les plus proches (cour, jardin, terrasse) + zones constructibles à la date de l’autorisation.